L'agriculture et en particulier la Viticulture a été une évidence.
La première noblesse est universelle : nourrir l'ensemble des humains, c'est-à-dire apporter ce qui nourrit le corps, et pas seulement apporter "la ration alimentaire". C'est aussi apporter des éléments de plaisirs et de découverte au travers d'un pays et d'un paysage.
L'agriculture est un témoignage d'éthique, de dévouements, ce n'est pas pour rien que nous avons dans le nom de notre métier "culture", c'est-à-dire "culte". Avoir le culte, c'est honorer, c'est vénérer, c'est rendre hommage...
À ce dévouement pour la nature et au "pays", en tant que paysan, nous avons joint le métier de restaurateur.
Nous sommes paysans et restaurateurs, nous utilisons la fermentation et l'usage du feu qui sont à l'origine des méthodes de conservation, mais également des modes de révélation, de sublimation de la matière brute, riche de ses caractères d'origines. C'est une métamorphose, le passage d'une matière brute, simple à un état complexe et subtil.
Au cours de mes 45 années de carrières, je me suis attaché à comprendre le pays où je vivais, de le servir et avoir la capacité d'apporter ce témoignage aux quatre coins de la planète.
Les rencontres culturelles sont toujours très utiles et permettent d'expliquer que nous ne venons pas "vendre" un produit meilleur, mais nous venons proposer un témoignage d'un autre pays. Nous pouvons rencontrer toutes les composantes qui forment notre planète en explorant sa géographie par le voyage, en écoutant leurs musiques, en admirant l'architecture dédiée, en découvrant les végétaux, animaux, aliments ou boissons spécifiques à un terroir et leurs façons de les préparer et de les cuisiner.
Je ne suis pas à la tête d'une exploitation, je n'exploite rien ni personne, mais je suis le serviteur de terres et de territoires.
Je m'occupe de 75 000 pieds de vigne qui vivent dans des villages différents (crus ou finages) et dans des maisons différentes (parcelles ou lieux-dits).
Le tout occupe une surface de 8,5 ha.
La petite taille qui me permet de faire du cousu main.
Le dévouement de mes collaborateurs
La compréhension de ma famille
La possibilité de mettre en scène notre activité grâce à notre hôtel-restaurant qui accueille des personnes des 4 coins de la planète.
La rencontre avec de grands biologistes comme Jean Marie Pelt, Marc André Selosse, Claude Bourguignon, Gérard Ducerf, Masanobu Fukuoka (père de la permaculture) m'ont rendu sensible au biotope et à l'écosystème spécifique de la Champagne : c'est ce que nous pouvons appeler un terroir. Depuis, je cultive et je sers ce pays, ce paysage singulier, en bon paysan.
Ma première pensée est de respecter les indigènes (plantes, animaux, insectes, macro organismes, micro organismes, ...), de façon à ne pas "coloniser".
Avec le domaine viticole, je cherche à "capter" le savoir du lieu, par la sève.
Les deux mots ont la même étymologie comme les mots saveur, savon, sapide ou insipide. C'est une évidence pour un producteur de whisky, de bière ou de saké, l'eau donne le caractère. Ensuite, par la fermentation et l'élevage, je cherche à minéraliser, c'est à dire à oxyder, c'est à dire à user l'organique pour faire apparaître la saveur spécifique du lieu.
Ce qui est unique en Champagne est notre craie du Campanien qui est une sédimentation de squelettes microscopiques de zoo-plancton dû au retrait de la mer qui a piégé tous les macros, micros et oligo-éléments de la mer et en particulier le sodium et le magnésium. Les autres calcaires proviennent de la cristallisation du carbonate de calcium par refroidissement.
Avec le restaurant, nous cherchons à proposer à notre table la spécificité du repas français reconnue par l'UNESCO et les spécificités des produits champenois tant en nourritures qu'en boissons.