J'ai découvert l'agriculture par le biais des chevaux : l'équitation a toujours été une passion, mais je me suis vite rendu compte que tout ce qui gravitait autour (l'élevage, la conduite des pâtures...) l'était tout autant. Puis est venue la volonté de maîtriser une production alimentaire du début à la fin, d'où l'installation en transformation fromagère fermière, avec un système autonome et économe.
Après avoir passé mon bac au lycée agricole du Nivot, j'ai poursuivi mes études à Rennes puis Dijon en école d'agronomie. Lorsque j'ai fini mes études en 2007, j'ai d'abord enseigné en maison familiale en Bourgogne, puis l'appel du Finistère m'a ramené au centre de formation de Kerliver, à Hanvec. J'ai ensuite entamé une installation progressive : achat de la ferme et des bâtiments, rénovation de la maison, semis des pâtures, aménagement de la fromagerie, achat du cheptel jusqu'à démarrer la traite et la transformation fromagère au printemps 2014.
La ferme est située à Quéménéven, au lieu-dit Pennevet Laurens. La surface totale est de 15,8 ha. L'intégralité de la surface est en herbe, conduite en agriculture biologique, sur laquelle pâturent 10 vaches Bretonnes Pie Noir (et des génisses). Le faible chargement permet d'être autonome en fourrage et de pratiquer le plein air intégral : les vaches ne rentrent que pour la traite. Sinon, elles sont tout le temps dehors. La production de lait est calée sur la pousse de l'herbe : naissance des veaux et début de la production laitière au printemps, et tarissement à Noël. En hiver, tout le monde se repose ! L'intégralité de la production laitière est transformée sur place : en tomme (la production principale), beurre, et brousse. Le petit lait est valorisé par 4 porcs blancs de l'Ouest. La viande est un produit secondaire non-négligeable : celle des porcs bien entendu, mais aussi surtout celle des veaux mâles, qui sont élevés sous la mère jusqu'à l'âge de trois mois. Les produits de la ferme sont commercialisés en direct ainsi que via un fromager-affineur brestois, la fromagerie du bout du monde.
Les atouts sont : l'autonomie, le respect de l'environnement, la participation à la préservation des races locales.
Il n'existe pas de tradition fromagère en Bretagne. Nous avons plus une tradition de production crémière. La production de beurre demi-sel s'inscrit dans cette tradition historique. La production de fromage et de brousse, en revanche est quelque chose de complètement nouveau. Il a fallu attendre que les Bretons partent au ski pour qu'ils mangent du fromage !
Mais aujourd'hui la demande pour de bons produits est bel et bien là. En tant que région herbagère, la Bretagne a un réel avenir dans la production de fromages de qualité à nous, producteurs fermiers, de nous former, de chercher à faire ressortir, à travers nos produits, toutes les qualités de nos laits. C'est pourquoi, même si 2019 est ma sixième année de transformation fromagère, ce domaine est si complexe (et donc si passionnant !) que j'ai l'impression d'avoir commencé hier.
Grâce à la Bretonne Pie Noir, les clients retrouvent "le goût du beurre" de leur enfance. Et la tomme, elle, au lait cru, va énormément changer de goût en fonction de l'année et de la durée d'affinage : douce au printemps, elle va gagner en caractère au fur et à mesure que l'on s'avance vers l'automne, et ses laits très gras. Tout étant fait sur place, de l'élevage à l'affinage, il ne peut pas y avoir de lien plus étroit avec le terroir.